Les rapports de la Fondation Abbé Pierre se succèdent années après années et dressent un constat toujours alarmant. En 2022, 4 millions de personnes non ou mal logées, 14.6 millions sont fragilisés par la crise du logement et nous comptons toujours 300 000 personnes sans domicile fixe. Cette situation est inadmissible dans un pays parmi les plus riches du monde. Par ailleurs, sans que des données chiffrées puissent encore être disponibles, les associations de lutte contre les expulsions nous alertent sur la hausse dramatique des impayés de charges liée à l’explosion des coûts de l’énergie en 2023 ainsi que l’inflation générale des prix.
Le 31 mars marque la fin de la trêve et la reprise des expulsions partout en France. A cette date, des milliers de ménages encourent un risque d’expulsion de leur domicile, sans que les solutions proposées soient acceptables, ou même existantes. Nous rappelons que le droit au logement est un enjeu fondamental pour la dignité humaine et un droit inaliénable et des mesures doivent être mises en œuvre pour permettre le maintien dans le logement.
Les expulsions ont un coût psychologique énorme et génèrent des effets délétères sur tous les membres de la famille : la crainte de la perte d’un emploi lié au stress provoqué par la peur de l’huissier et des forces de l’ordre, l’absence de recours aux soins essentiels pour la santé physique et mentale, ou encore le risque de la déscolarisation des enfants. En outre, l’absence de relogement démultiplie ces risques pour la santé des parents et des enfants, qu’ils se retrouvent dans un hébergement précaire, un squat, à la rue ou dans des bidonvilles, ballotés d’un lieu de survie à un autre.
La situation en Outre-Mer requiert également une attention accrue. Le Canard Enchaîné se faisait l’écho d’une future opération de décasage massive – autrement dit, la destruction de plusieurs centaines d’habitats informels constituant les bidonvilles – à Mayotte. Quelles solutions de relogement vont-elles être apportées ?
Des solutions existent pour l’accompagnement des ménages et éviter les expulsions : ouvrir des droits, régulariser, faciliter l’obtention de titres de séjour de longue durée, faciliter la prise de contact avec les associations et services sociaux compétents avant de se trouver engagé dans une procédure judiciaire. Ces mesures permettent d’éviter la bascule de milliers de personnes dans une précarité accrue. Un examen approfondi de la situation du ménage, visant à chercher des solutions alternatives, doit permettre d’écarter le recours à la force publique. Par ailleurs, la grande conférence sociale voulue par la NUPES doit permettre de redonner du pouvoir de vivre à tous les travailleurs·ses, dont les plus précaires.
Plutôt que la précarisation de milliers de ménages, nous faisons le choix de considérer le droit au logement comme un droit fondamental et non négociable. Il doit primer sur le droit à la spéculation immobilière. Les politiques de séparation du foncier du bâti, qui font entrer le sol dans le champ des biens communs, doivent être renforcées et étendues à toutes les zones dites tendues.
Alors que le nombre de places d’hébergement va être amené à diminuer fortement et que l’offre locative se fait rare, nous devons maintenir à tout prix les personnes dans leur logement. Dans une société comme la nôtre, nous ne tolérons pas de voir le nombre de personnes sans-abri augmenter.
➡ Nous demandons donc l’interdiction des expulsions sans solution de relogement tout au long de l’année.
➡Nous tenons également à signifier notre opposition totale à la proposition de loi dite “Kasbarian-Bergé” qui criminalise les ménages en difficulté.
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